À Auschwitz les illusions qu’offrait la civilisation occidentale se sont brisées.
Tout ce qui nous semblait jusqu’alors humain, authentique et juste s’est effondré dans l’abîme infernal que constituait ce néant.
Auschwitz signe l’avènement du non-être.
Là où l’humain n’a plus de sens !

Extrait

Je me trouvais à présent dans un camp "d'extermination" et non pas dans un camp de concentration. Énorme différence dans l'horreur ! L'illustration de cette différence est confirmée par environ quarante pour cent de survivants des camps de concentration, alors que trois pour cent seulement des soixante-seize mille juifs déportés de France sont revenus des camps d'extermination.

Depuis combien de temps des femmes, des hommes et des enfants innocents avaient-ils été réduits en cendre ? Combien de personnes ont été éliminées au cours des sélections fréquentes, parce que ne pouvant plus être exploitées comme main-d'oeuvre utile à la machine de guerre nazie ? Combien de vies inacomplies, fauchées ? Quel outrage pour la valeur suprême qu'est la vie ! Toutes ces pensées se bousculaient dans mon esprit. Ce fut la journée la plus dramatique de ma vie concentrationnaire !

Comment trouver encore des forces pour lutter et tenter de survivre ? Avais-je seulement une chance d'échapper aux douches fatales ? Après une période d'abattement, l'instinct de survie a pris le dessus, et comme un défi j'ai fait mienne l'inscription que j'ai lu gravée sur le mur de Drancy : " Quand il n'y a plus rien à espérer, c'est là qu'il ne faut pas désespérer. "


"Pour Paul Schaffer, c'est surtout le sentiment d'un devoir à accomplir qui l'a conduit à écrire le présent ouvrage, quelles que soient les difficultés et la douleur que ce travail d'écriture et de mémoire lui a imposées.

Il ne s'agissait pas seulement de parler de la période particulièrement cruelle de sa vie, les persécutions en Autriche, la fuite en Belgique, l'exode vers la France, des années de vie clandestine, l'arrestation, la déportation avec sa mère et sa soeur, qui ont été gazées dès leur arrivée à Auschwitz. Il tenait aussi à évoquer la vie de famille avec sa soeur, ses parents et ses grands-parents ainsi que tous ceux qui avaient fait partie de son existence d'enfant, lorsqu'ils habitaient à Vienne avant l'Anschluss. À tous, à travers son récit, il exprime sa reconnaissance pour le bonheur qu'ils lui ont été donné et dont il a toujours conservé le souvenir au fond de son coeur, certes avec tristesse, mais aussi une très grande tendresse. C'était le bonheur simple d'un petit garçon au sein d'une famille unie, celui des vacances, des longues promenades et des goûters chez le meilleur pâtissier, c'était aussi la classe et les jeux avec ses camarades ou encore son attachement à sa collection de timbres à laquelle il tenait tant qu'il l'avait emportée avec lui, en cachette, lorsque la famille a été contrainte de fuir l'Autriche."

Extrait de la préface de Madame Simone Veil